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Cécile Bourreau-Dubois, nouvelle Directrice du PPR Autonomie

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A compter du 1er septembre 2023, Cécile Bourreau-Dubois, Professeur d’économie à l’Université de Lorraine, prend la direction du PPR Autonomie à la suite de Claude Martin, nommé en juin 2020. Dans cet entretien à deux voix, ils reviennent sur les grandes étapes qui ont marqué le programme depuis son lancement, et dressent quelques perspectives pour les années à venir. 

PPR Autonomie – Claude Martin, vous êtes sociologue, directeur de recherche émérite au CNRS et, depuis le 1er septembre, Président du Conseil scientifique du PPR Autonomie ; vous occupiez également jusqu’à présent le rôle de Directeur du programme. Avec cette double casquette, vous avez accompagné les trois premières années du PPR. Pouvez-vous nous en retracer les grandes étapes et leurs principaux enjeux ?

Claude Martin. Après une réflexion préalable sur le périmètre de la notion d’autonomie en lien avec l’avancée en âge et les situations de handicap, la première étape a été d’identifier et réunir un Conseil scientifique pluridisciplinaire mobilisant un large périmètre de compétences allant des sciences humaines et sociales (droit, sociologie, économie, science politique, géographie, anthropologie), aux sciences de l’ingénieur, en passant par les sciences numériques et de la santé. Ce conseil de quinze membres a joué un rôle clé en définissant quelques défis scientifiques majeurs. Quatre défis prioritaires ont ainsi été retenus qui ont constitué la base de la préparation des textes d’appels à projets. En accord avec ses partenaires, à commencer par l’ANR qui est l’opérateur de ce programme, le Conseil a choisi de regrouper ces défis en deux appels à projets qui ont été soumis à la communauté scientifique respectivement en 2021 et 2022, en veillant à soutenir et préparer celle-ci aux attendus du programme, que ce soit en termes de retombées pour les personnes concernées, mais aussi en termes scientifiques et de pluridisciplinarité.

En plus du Conseil scientifique, une autre instance a été mise en place, le Comité consultatif des parties prenantes. Ce Comité d’une quinzaine de membres regroupe des acteurs du champ, que ce soit au plan de la recherche avec des experts étrangers, des représentants des grands organismes de recherche, mais aussi des parties prenantes (représentants du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), mais aussi grandes associations du champ), et des personnes qualifiées. Le rôle de ce comité est de veiller à ce que le programme réponde au mieux aux attentes croisée des usagers, des décideurs publics en lien avec les avancées de la recherche internationale à visée opérationnelle.

Une autre étape majeure a été la mise en place d’une équipe projet chargée de suivre et accompagner le programme sur l’ensemble de sa durée, en étant force de propositions sur plusieurs dossiers majeurs pour garantir ce que nous avons choisi d’appeler un « effet programme », soit le résultat cumulé de l’ensemble de ces recherches en consortium. Parmi les dossiers clés : la question des données et de leur exploitation, la question de la médiation scientifique, celle des liens avec la communauté internationale de recherche sur ces questions, celle de la communication et de la dissémination des résultats du programme. L’équipe projet est donc conçue comme un atout majeur pour l’ensemble des projets retenus, leur permettant de faire lien et de capitaliser à l’échelle de l’ensemble du programme.

PPR Autonomie – Cécile Bourreau-Dubois, vous êtes économiste, Professeur à l’Université de Lorraine. Vous avez rejoint le Conseil scientifique en novembre 2022 et êtes depuis le 1er septembre 2023 Directrice du PPR Autonomie. Qu’est-ce-qui vous a intéressé à prendre ces nouvelles fonctions ?

Cécile Bourreau-Dubois. J’ai accepté cette responsabilité pour plein de raisons. J’en citerais deux.

La première c’est la thématique du programme Dans le cadre de mes travaux de recherche, je m’intéresse notamment aux questions économiques soulevées par la mise en œuvre des politiques sociales décentralisées de prise en charge de la dépendance des personnes âgées. Cela m’a donc semblé particulièrement stimulant intellectuellement d’avoir l’opportunité de travailler dans un champ qui m’était familier avec des chercheurs et chercheuses relevant de disciplines différentes de la mienne, mobilisant des méthodologies variées et s’appuyant sur un solide réseau international.   

La seconde c’est la perspective de pouvoir inscrire mon action dans un temps long. La durée pluriannuelle du programme permet de penser une politique d’animation scientifique, de la mettre en œuvre et de pouvoir en mesurer les résultats, qui j’espère seront nombreux que ce soit dans le domaine scientifique mais également dans la sphère publique ou au sein de la société civile grâce à la dissémination de connaissances, qui pourra notamment se faire grâce à nos actions de médiation scientifique.

PPR Autonomie – 2023 est une année charnière pour le programme, marquant la transition entre une première phase consacrée à la préparation des opérations de financement, et une seconde orientée vers l’animation. En tant que Président du Conseil scientifique et Directrice du programme, quels sont selon vous les principaux défis de cette nouvelle phase du programme ? 

Claude Martin. La première phase va s’achever avec l’annonce officielle des résultats du deuxième appel à projet, qui devrait intervenir très prochainement. Au total, ce seront sans doute une grosse dizaine de projets qui seront financés ; quatre ont été retenus dans le cadre du premier appel, au travail depuis plus d’un an maintenant. Chaque projet est ambitieux et fonctionne en consortium pluridisciplinaire impliquant un grand nombre d’institutions et d’établissements. Il s’agit déjà d’une communauté, au sens où chaque projet est susceptible de mobiliser d’une à plusieurs dizaines de chercheurs et de chercheuses, juniors et seniors, de nombreuses universités et grands organismes, en lien avec des communautés d’acteurs sur l’ensemble du territoire.

Le défi principal désormais est de faciliter la communication entre tous ces projets qui ont leurs axes de déploiement respectifs, de nourrir un dialogue intense sur les recherches en train de se faire, bien en amont de la phase de valorisation. Ce que nous appelons « l’effet programme » réside précisément dans cette construction en temps réel d’un champ de recherche qui demeure encore fragmenté. Il s’agit aussi de s’adresser à toutes les communautés de recherche et de pratiques intéressées en France par ces questions d’autonomie. La direction du programme et son équipe projet, bien sûr, avec l’appui du Conseil scientifique, sont la clé de ce travail d’animation scientifique à l’échelle du programme.

Cécile Bourreau-Dubois. Pour ma part, j’identifie deux défis principaux. Sur le plan institutionnel, il faut que le PPR Autonomie trouve sa place dans un champ où existent déjà de nombreux acteurs historiques, que ce soit des administrations publiques, des collectifs de chercheurs ou des fédérations émanant de la société civile. L’ambition du programme n’est pas d’être simplement un acteur de plus dans le champ de l’autonomie mais d’être un acteur venant apporter son expertise et sa compétence, au travers notamment de son équipe projet, pour co-construire des actions ambitieuses avec les acteurs du champ. Par exemple, en juin dernier, le PPR Autonomie a co-organisé en partenariat avec le Programme handicap et sociétés de l’EHESS la 11ème conférence annuelle Alter réunissant des chercheurs français, européens et internationaux autour de la thématique du handicap et des altérités.

Le second défi est de réussir à nouer un dialogue avec les acteurs de la décision publique comme avec les parties prenantes sur des questions qui sont souvent au cœur de l’actualité mais qui finalement mobilisent assez peu les résultats des travaux des chercheurs. L’enjeu est donc de parvenir à contribuer au débat public en partageant et en mettant en dialogue apports de la recherche et besoins de connaissances de la société, comme cela se fait dans d’autres pays européens.

PPR Autonomie – Pour terminer, peut-être une indiscrétion sur les prochains temps forts du PPR Autonomie ?

Claude Martin. La France n’est bien entendu pas le seul pays à avoir mis en œuvre des programmes de recherche de grande ampleur pour faire face au défi de la longévité, mais aussi du handicap. De nombreux pays, comme le Royaume-Uni, le Canada, les pays scandinaves, la Suisse, les Etats-Unis, par exemple, ont déployé des programmes de recherche analogues au nôtre, en durée et en investissement. Depuis le démarrage de cette aventure, nous avons établi des liens avec plusieurs de ces gros programmes arrivés à différentes étapes de maturité. Un temps fort à venir à l’automne 2024 sera la tenue d’une première conférence internationale qui nous permettra de faire le point sur les principaux résultats de plusieurs de ces programmes de recherche internationaux. Nous aurons ainsi l’occasion de confronter nos propres orientations en France et de renforcer ce dialogue international et pluridisciplinaire sur des défis qui se posent à l’échelle planétaire. L’idée est de tenir un séminaire ou une conférence internationale par an sur toute la durée du programme.

Cécile Bourreau-Dubois. A plus court terme, nous avons le plaisir d’organiser le 20 octobre prochain la réunion d’installation du groupe des acteurs en charge de l’animation et du financement de la recherche dans le champ de l’autonomie. L’objectif avec ce groupe, installé à l’initiative du PPR Autonomie, est de créer des synergies, de faciliter les collaborations sur des projets d’envergure entre tous ces acteurs qui partagent des objectifs communs mais qui pour autant n’ont pas forcément des habitudes de co-construction à cette échelle.

Photo de Cécile Bourreau-Dubois, format portrait, devant une fenêtre.
Photo de Claude Martin, assis, tenant des papiers sur ses genoux.